Le monstre Nucléaï

par Mimi Barthélémy
pour les Journées d'Études, le 19 juin 2011

 

 

Cric ! Crac !
Voilà ! Dieu vient de créer les hommes et les bêtes.

Diable commence à peine son travail. Il fait un monstre laid, gros comme une baleine avec une tête de macaque.
Le monstre Nucléaï ouvre les yeux pour la première fois avant que le jour n’ouvre les siens
Il découvre la mer qui brille comme les écailles de poisson. Il découvre les plaines, il voit des mornes, des mornes partout. Il sent une brise fraîche et renifle de bien-être.
Et le soleil paraît…

Il y a le soleil, le vent, la terre qui sent bon… la nature pleine de richesses et de douceurs…
Le monstre les voit, ouvre une large gueule, tire une longue langue et avale,
Kloups !
Comme un chien avalerait une mouche et puis il les recrache
Pareilles mais différentes…

Il a gardé dans son ventre les bonnes fées qui veillent sur l’harmonie de la mer, de la terre et du ciel et il a recraché à la place la fée électricité.
Tout réchauffé, il enjambe alors les mornes, il enjambe les mers. On l’entend rire :
Kwa-kwa-kwa !­
On l’entend chanter :
« Je dis que la fée électricité est vrai paradis »

Lorsqu’il est fatigué de voyager, il se pose à un endroit et fait un gros caca, un petit enfant Nucléaï qui aussitôt se met à rire et à chanter :
« Je dis que la fée électricité est vrai paradis »

Et les hommes, les femmes et les enfants n’ont plus besoin d’aller se réchauffer aux rayons du soleil, le soleil avalé par Nucléaï est devenu vrai paradis… et les hommes, les femmes et les enfants, dansent dans leurs maisons éclairés par la fée électricité 

La fée électricité qui leur donnera avenir meilleur
La fée électricité qui leur donnera nouvelle mémoire
La fée électricité qui leur donnera roses de plastiques colorées

 

 

Depuis que le monstre a avalé le soleil, le vent et la terre qui sent bon et les a recrachées
Pareilles mais différentes
Mais en gardant dans son ventre les bonnes fées qui veillent sur l’harmonie de la mer, de la terre et du ciel

Les animaux n’ont plus le goût de vivre
Ils disparaissent l’un après l’autre pour laisser la place à de nouvelles espèces
Fabriquées par le monstre Nucléaï

Les plantes n’ont plus le goût de vivre
Elles disparaissent pour laisser la place à de nouvelles espèces
Fabriquées par le monstre Nucléaï

Et puis les hommes dépérissent
Ils ne savent plus que servir Nucléaï et ses enfants
Ils adorent chaque jour Nucléaï et chantent des cantiques pour sa nouvelle mémoire

Vive la fée électricité qui est vrai paradis
Vive les nouveaux animaux et les nouvelles plantes qui sont vraie nourriture
Vive les enfants de Nucléaï et leur religion le progrès…

Et de temps en temps, Nucléaï leur envoie une petite catastrophe
Et à chaque catastrophe, les hommes, les femmes et les enfants sont encore plus faibles et augmentent encore le pouvoir de Nucléaï et de ses enfants

Hiroshima
Viva Nucléaï

Nagasaki
Viva Nucléaï

Three Miles Island
Viva Nucléaï

Tchernobyl
Viva Nucléaï

Fukushima
Viva Nucléaï

Et à chaque catastrophe
des hommes, des femmes et des enfants meurent pour  que Nucléay et ses enfants grossissent
et tous ils rient :
Kwa kwa kwa
et tous ils chantent :
Kwa kwa kwa…

 

Un jour, Bon Dieu dit :
« Mes gens souffrent trop ! »

Il appelle une de ses créatures qu’il s’amusait à nommer Pitit Terrien.
Il lui donne une machette et lui demande d’aller au devant du monstre et de chanter des qu’il le verra :

Je dis que les animaux doivent retrouver le goût de vivre
Je dis que les plantes doivent retrouver le goût de vivre
Je dis que les enfants, les femmes et les hommes doivent retrouver le goût de vivre
Je dis que la fée électricité n’est qu’une mauvaise fée fabriquée par le monstre Nucléaï et que les bonnes fées sont dans le ventre de Nucléaï et qu’il faut les délivrer car ce sont elles qui sont vrai paradis.

Les fées de notre père soleil
Les fées de notre père vent
Les fées de notre mère terre

Il prend la machette et part au devant du monstre
Dès qu’il l’entend chanter et rire :
 « Je dis que la fée électricité est vrai paradis »
Il chante à son tour :
« Je dis que les fées de nos pères soleil et vent, de notre mère terre sont vrai paradis »

Nucléaï le voit, ouvre la bouche, tire la langue et l’avale
Klips
Pitit Terrien manque d’étouffer mais il ne meurt pas
Il va rejoindre les fées de nos pères soleil et vent, de notre mère terre et de notre grand-mère mer.
Et il leur dit « courage », je suis venu pour vous délivrer.

Alors il descend dans le monstrueux estomac et il joue de la machette, taillade par-ci, sectionne par là, creuse une percée vers le cœur.
Il atteint le cœur, l’arrache et le hache menu.
Le monstre Nucléaï s’écroule mort.

Pitit Terrien prend les mains des fées et avec elles il cherche une sortie.
Pauvre Diable, il est bien déçu, une fois au dehors, de voir le monde plongé dans les ténèbres.
Mais les fées lui disent : courage Pitit Terrien, nous allons redonner la lumière…

Alors les fées du soleil activent la lumière de leur père, elles habillent de voiles arc en ciel et de guirlandes de soie les maisons de leurs sœurs et frères humains et la lumière pénètre à l’intérieur de leur maison, une bonne lumière chaude qui leur donne envie de sortir et de rire…

Alors les fées du vent prennent dans leurs mains le souffle de leur père et elles le font souffler sur les machines qu’avait construit Nucléaï et le souffle du vent pénètre à l’intérieur des machines et les machines se mettent rire et à chanter et répandent une énergie de joie qui donnent à leur frères et sœurs humains l’envie d’aller chanter leur joie au dehors car le dehors est devenu comme le dedans…

Alors les fées de notre mère la terre répandent elles aussi les bienfaits de notre mère et tout le monde se sent chez soi, dehors comme dedans…

Alors les fées de notre grand-mère la mer préparent de nouvelles recettes pour la grande soupe de la vie, pour la grande soupe aux miracles qui nous donnera chaleur, nourriture et bonnes vibrations.

Et depuis ce temps là, les fées du soleil du vent de la terre et de la mer ont toujours répandu la lumière, le souffle et les bienfaits…

Voici ! Voilà !

Cric ! Crac !